Les Oracles chaldaïques sont attribués à Julien et datent du 2ème siècle ap. J.-C. C’est un texte court, dense, profond, ouvrant, œuvrant. On y trouve des formules, célèbres dans d’autres contextes, comme : « un Esprit issu de l’Esprit » (νοῦ γάρ νόος).
Phrases oraculaires, dont les éclats anciens brillent d’un feu incertain, pépites vieilles, usées, précieuses.i
Mille ans après leur parution, Michel Psellus (1018-1098) a écrit les Commentaires des Oracles chaldaïques, et en a fait ressortir les influences assyriennes et chaldéennes.
Mille ans après Psellus, Hans Lewy leur a consacré son grand œuvre, Chaldean Oracles and Theurgy. Mysticism magic and platonism in the later Roman Empire (Le Caire, 1956).
D’autres savants, tels W. Kroll, E. Bréhier, F. Cumont, E.R. Dodds, H. Jonas se sont penchés sur ces textes, entre la fin du 19ème siècle et le début du siècle dernier. Bien avant eux, une chaîne antique de penseurs, Eusèbe, Origène, Proclus, Porphyre, Jamblique, avait tracé des pistes. Il en ressort qu’il faut remonter à Babylone, et plus avant encore au zoroastrisme, pour tenter de comprendre le sens de ces poèmes magico-mystiques, qui obtinrent chez les néo-platoniciens le statut de révélation sacrée.
Qu’en reste-t-il ? Des idées comme celle du voyage de l’âme à travers les mondes, et des mots comme « anagogie » ou « Aion », qui est un autre nom de l’éternité. Il reste aussi l’hypothèse de « l’hypostase noétique de la Divinité », comme le formule Hans Lewy.
G. Durand a eu cette formule fameuse: « Le symbole est l’épiphanie d’un mystère. »ii Qu’il me soit permis de la paraphraser : le poème, l’oracle, mystifie le monde, et leurs étincelles éclairent la nuit.
Salomon disait : « Moi, la Sagesse, j’ai habité au Conseil, j’ai appelé à moi la connaissance et la pensée. »iii
Les « modernes », qu’ont-ils à dire au sujet du mystère, de la Sagesse, et de la « fulguration de l’esprit » ?
Il est temps de changer d’époque. Modernité aveugle et sourde, je n’ai qu’un mot à l’esprit : Exit ! Exit !
iEn voici une poignée :
« Le silence des pères, dont Dieu se nourrit. » (16).
« Vous qui connaissez, en le pensant, l’abîme paternel, au-delà du cosmos. » (18)
« Tout esprit pense ce Dieu. » (19)
« L’Esprit ne subsiste pas indépendamment de l’Intelligible, et l’Intelligible ne subsiste pas à part de l’Esprit. » (20)
« Artisan, ouvrier du monde en feu. » (33)
« L’orage, s’élançant impétueux, atténue peu à peu, la fleur de son feu en se jetant dans les cavités du monde. » (34)
« Pensées intelligentes, qui butinent en abondance, à la source, la fleur du feu, au plus haut point du temps, sans repos. » (37)
« Le feu du soleil, il le fixa à l’emplacement du cœur. » (58)
« Aux fulgurations intellectuelles du feu intellectuel, tout cède. » (81)
« …être asservis, mais d’une nuque indomptée subissent le servage… » (99)
« N’éteins pas en ton esprit. » (105)
« Le mortel qui se sera approché du Feu tiendra de Dieu la lumière. » (121)
« Ne pas se hâter non plus vers le monde, hostile à la lumière. » (134)
« Tout est éclairé par la foudre. » (147)
« Quand tu auras vu le feu saint, saint, briller sans formes, en bondissant, dans les abîmes du monde entier, écoute la voix du feu. » (148)
« Ne change jamais les noms barbares. » (150)
« Ne te penche pas vers le bas. » (164)
« Et jamais, en oubli, ne coulions, en un flot misérable. » (171)
« Les enclos inaccessibles de la pensée. » (178)
« La fureur de la matière. » (180)
« Le vrai est dans le profond. » (183)
« Temps du temps (χρόνου χρόνος). » (185)
ii G. Durand L’imagination poétique
iii Prov. 8,12