Une incitation permanente à relancer les dés, chez Michaux. À rebander l’arc des possibles, à changer de flèche et de cible. À viser l’invisable. Vers le bas, jamais. Vers le haut, toujours. Le plus haut, malgré la perte patente.
« Après le coup de grisou dans la tête, l’horreur, le désespoir après qu’il n’y a rien eu, tout dévasté, sabordé, toute issue perdue
un ciel glacialement ciel
Obstrué à présent, barré, bourré de débris ;
ciel à cause de la migraine de la terre
dépourvue de ciel
un ciel parce qu’il n’y a plus nulle part où poser la tête
Traversé, rétréci, rentré rogné, défait intermittent, irrespirable dans les explosions et les fumées
bon à rien
un ciel désormais irretrouvable »
– Non que, pour ma part, je veuille gagner ou perdre ! Seulement continuer le jeu, plus longtemps, toujours.
Seul sur cette barque, jouet de la mer et des nuits, je cherche dans l’ombre des éclats ténus, des scintillements infimes.
« Sur une étrave fendant une mer sans flot
un être debout penché sur l’avant
passent obliquement d’autres étraves
leur occupant pareillement penché
Pas de ports. Ports inconnus
Quelques signes parfois d’étrave à étrave
qui alors se rapprochent »
Il n’y a pas d’entrave à la bifurcation des caps. D’assez proches étraves convergent un temps, pour échanger seulement un signe ! On cherche diagonalement, à l’estime, des ports « inconnus », peut-être inconnaissables, et qui sans doute n’existent pas.
Dans la langue future, humble, je doute qu’il y ait une place pour le mot « port ». Et pour sa rime trop riche, parfaitement déplacée, inadéquate, le mot « mort ». En revanche, il y aura le mot « envie », – qui, mieux que rime, rame avec « va ! ».