Brèves consciences, 3


« Abysse en apnée »

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Sera-ce Abysse ou Odyssée?

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Naître est nécessaire.

Être, non.

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L’être paraît d’abord d’ombres et d’odeurs, bouche et toucher. Faim, voix, soif. Chaleur, délices, liquides. Temps, lumières, sons, lèvres, peau, langue. L’être lent, gouffre sans fin, abîme mou, terre confuse, rêve fendu, sourire clos. Mystère ouvert. Franc pourquoi.

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Avant de surgir à l’être, la conscience se pressentait, se prélassait, se présentait peut-être à sa présence. Quelle était-elle, avant seulement d’être ? Virtuelle et vertige. Ivre et vive. Pur projet, sans sujet, ni objet. Non sans songe.

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De l’inconscient à la conscience, et retour. Toujours, sauts, sursauts, soubresauts. Le sommeil bondissant de l’éveil.

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Paix, faste, pompe et vélocité. L’inconscient, maître des temps. Lui lâcher la bride. Le laisser galoper au loin, au fond.

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« Vie intérieure ». Puce sourde. Fil fin. Feu local. Pluie sidérale. Cheveu unique.

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Naître abîme.

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Être précipite.

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(Infiniment petitement)

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Sens aussi ses secrets silencieux s’élancer !

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Non, on ne contient l’inconscient.

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La conscience, bref florilège : Nue mise à nu. Buée bue. Boue lourde. Aurore, orée. Pantoise pâmoison. Bouffée touffue. For un tiers rieur. Éclair accru. Par Aton, aile, erre. Orage orange. Nuée exténuée. Désert désempli. Mer mi-roide. Soleil celé.

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En naissant, en un instant, on plonge hors du soi, et en soi. On naît au dehors, et en dedans. On aspire, on s’ouvre. Tout à la fois : lumière, voix, chaleur, peau, haleine. Irruption de l’autre. Toutes sortes d’autres. Par tous les pores, les ports. Vagues, ils déferlent. Le bruit de la mère s’est tu. Mais on sent son pouls, tout contre la peau. Les poumons s’emplissent. Le sang bat. L’air neuf coule dans le sang renaissant. Nouvellement né, lentement, le Soi s’initie, sort de son oubli, se sent déclore, conscient de son inconscience.