Les 1% contre le reste du monde, premier round


Toujours à la recherche de parcelles de vérité tombant de la bouche des grands médiateurs, j’ai noté ces lignes de Paul Krugman, lauréat du prix Nobel d’économie et éditorialiste du New York Times, dans son dernier article « Pollution and politics » publié aujourd’hui (29 novembre 2014).

« The basic story of political polarization over the past few decades is that, as a wealthy minority has pulled away economically from the rest of the country, it has pulled one major party along with it. True, Democrats often cater to the interests of the 1%, But Republicans always do. »

Soulignons cette simple phrase, venant d’une telle plume, dans un journal comme le New York Times : « C’est vrai, les Démocrates soutiennent souvent les intérêts des 1%, mais les Républicains, eux, le font toujours. »

Elle contient trois idées simples. La démocratie est une farce. Les Démocrates et les Républicains travaillent pour les mêmes 1% . La riche minorité s’est retiré économiquement (mais pas politiquement) du pays.

Ceci résume assez bien l’état de l’Union, mais aussi l’état du monde et annonce brièvement la prochaine étape dans sa décomposition. Si l’on devait généraliser au plan mondial les trois idées de Krugman, idées qui sont déjà une évidente évidence entre Wall St et Capitol Hill, cela donnerait ceci.

  1. La « démocratie » tend à la farce mondiale. Elle est déjà une farce dans maints pays, grands donneurs de leçons. Et la farce tourne au cauchemar dans les pays dominés par les mêmes mécanismes, simplement en plus impitoyables, plus systématiques, plus carnassiers, plus sanglants. L’exemple du Mexique doit être médité. On y voit à nu, et presque par hasard, la collusion endémique des maffias, des polices et des politiques. Vous croyez qu’il s’agit d’un épiphénomène, d’une particularité endogène? Non, il s’agit d’un paradigme, en voie de mondialisation. On retrouve, et même en pire, les mêmes collusions à l’Est, au Nord, au Sud, à l’Ouest. Des noms ? Prenez une carte, et plantez une épingle.
  2. La Gauche et la Droite, c’est pareil. On dit : Gauche contre Droite. Mais c’est de la poudre aux yeux, du vide, de la propagande, du mou, de la manipulation de masse. Ce sont les mêmes, comme deux soda cancérigènes. Ils travaillent tous pour les 1%, en paroles et en actes. Oubliez le reste, l’immense reste, les laissés-au-bord-de-l’autoroute du monde. Tout le reste, chair à canon, chair à chômage, chair à bombes, chair à chars, chair à viols, chair à guerres, chair à télé, chair à Black Friday, chair à Thanks Giving.
  3. L’exode industriel, puis fiscal, puis politique ne fait que commencer. Toute la richesse du monde a vocation à se réfugier au paradis mondial. Le paradis virtuel des fonds noirs et des fonds blanchis, des fonds maffieux et des fonds « évadés » (comme de la prison du droit), ces fonds qui tournent à la vitesse de la lumière, sans droits, sans taxes, sans impôts, sans douane, sans contrôle, et sans cesse, et dont les portes d’entrée sont cachées dans les trous noirs du Dark Internet ou du Deep Web, ou dans les yachts de luxe paradant dans les ports, francs ou non.

    Notons en passant que la technique a énormément progressé. De façon foudroyante. Quelques agences dans le monde, aux sigles à trois ou quatre lettres, peuvent pénétrer n’importe quand, n’importe où, dans n’importe quel ordinateur, en quelques secondes, et y faire n’importe quoi. La gamme est longue des possibilités de fraude, d’espionnage, de malversations, de manipulation. A-t-on pris suffisamment conscience de ça? Ce n’est qu’une première étape. La suivante sera la privatisation de l’usage de ces techniques, leur marchandisation. Les 1% seront les premiers consommateurs, et pour une part les premières victimes, qui sait ? La question ne se pose pas simplement par rapport à la « vie privée », qui n’est plus qu’un bout de tissu transparent en guise de feuille de vigne. Mais surtout par rapport à la puissance incroyablement menaçante, potentiellement destructrice, oppressante, tyrannique, qui s’accumule toujours davantage, rapidement et sûrement. Les techniques ne sont plus que les symboles friables, les métaphores de notre asservissement mondialisé à ceux qui les font évoluer selon leurs besoins de contrôle, de corruption, de collusion et de décérébration.

Le « reste », tout cet immense reste ne fait que deviner confusément ce qui se prépare. On n’en peut mais, se dit le « reste ». Comment agir ? Par quoi commencer ?

Voici quelques pistes, juste pour se faire la main :

Militez partout où c’est encore possible pour une politique générale des « biens communs » matériels et immatériels, pour une réforme nationale, européenne et mondiale de la fiscalité, avec notamment l’éradication des paradis fiscaux.

Militez pour une priorité absolue donnée à l’enseignement pour tous, tout au long de la vie.

Militez pour un revenu de vie minimum assuré à tous les humains, financé par une taxe mondiale sur les capitaux circulants et les capitaux immobiles.

Militez pour une politique d’énergie pollueurs-payeurs et une valorisation exacte des externalités négatives des usages des énergies fossiles et nucléaires (en prenant tout particulièrement en compte les coûts à long terme).

Militez pour une orientation générale de la civilisation non sur la consommation mais sur la création, la production de connaissances, le partage des relations humaines.

Et votez massivement pour les partis qui reprennent au moins l’une de ces idées. S’il n’y en a pas, fondez-le !

La « Grande Guerre Terminale » du 21ème siècle.


Il faut prendre comme un révélateur la droitisation accélérée des droites en Europe, sur le thème de l’immigration notamment, et sur fond de crise continue, semblant sans issue. Ainsi le retour de Sarkozy, l’attitude autiste et répugnante d’un Cameron, la Suisse raciste et haineuse, etc.

Tout cela révèle quoi ?

D’abord la lâcheté, la myopie, le populisme des dirigeants de ces partis xénophobes, étriqués, sans imagination, corrompus, et marionnettes d’intérêts puissants et occultes, qui favorisent tout ce qui peut faire diversion dans l’esprit inconstant et mobile des peuples.

Ensuite, l’incapacité structurelle, systémique, des hommes politiques au pouvoir à traiter effectivement les maux mondiaux dont ils sont eux-mêmes les responsables, les organisateurs. Certes on peut demander à des pompiers pyromanes, simplement parce qu’ils portent l’uniforme, de lutter contre les incendies dont ils sont eux-mêmes les boutefeux. Mais l’eau qu’ils projettent sur les flammes semble raviver encore et encore ce qu’elle est censée éteindre. Cette eau incendiaire, voilà leur contribution à la paix mondiale.

Ensuite, il y a l’égoïsme et la cécité des peuples, toujours prêts à voir flatter leurs plus bas instincts. La boucherie syrienne, le virus d’Ebola, les maffias mexicaines, le hachisch marocain, les falsifications en Ukraine, la corruption systémique du football mondial, les manipulations boursières et monétaires, sont autant de facettes, autant de symptômes d’un mal beaucoup plus profond.

Quel est ce mal ? Il n’y a pas d’ordre mondial, n’en déplaise à Hobbes. Ou plutôt, il y a un ordre délibérément saboté, par et pour ceux à qui ce désordre organisé profite. Les peuples du monde, dans leur immensité passive, sont comme un grand troupeau docile, naïf, obéissant, crédule. Au-dessus d’eux règne un monde de maffieux, de truands, d’assassins à petite et à grande échelle. Au-dessus encore, dans le monde de la grande politique, on voit de grands félins immobiles, fixant leurs yeux jaunes sur les parties en cours,touchant leurs pourcentages en monnaies, en soutiens ou en voix.

Il n’y a pas d’ordre international. Ou plutôt il y a un ordre savamment désordonné, qui profite énormément à ceux qui ont su dérégler le système à leur avantage, et qui fait souffrir les peuples, soit par la misère, l’esclavage social, ou la guerre, la destruction.

Rien ne semble contredire cette analyse pessimiste. Tout semble indiquer que ces tendances néfastes vont en fait se confirmer, s’aggraver.

La droitisation en Europe, disais-je, est un symptôme. Un symptôme, bien faible au demeurant, un simple clignotant, de ce qui nous attend tous collectivement.

Oui nous allons vers une Troisième Guerre Mondiale. Ce sera une Guerre Civile Mondiale. Ce sera la « Grande Guerre Terminale » du 21ème siècle. Les maffias de territoires et de réseaux, les politiques menteurs, manipulateurs et corrompus, les extrêmes religieux de tous acabits, les médias faillis, achetés, vérolés, décomposés, les intellectuels complices et coupables, les banquiers véreux, les capitalistes suceurs de sang, vampires pestifères, voilà les millions d’anges noirs qui préparent le prochain holocauste, l’holocauste immonde et massif que l’humanité se donnera à elle-même en son propre honneur.

Où sont les forces de résistance ?

En théorie, il y en a des milliards. En pratique, comme toujours, l’esprit sera en retard sur l’événement.